Le 1er juillet, l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) et France Victimes ont renouvelé pour trois ans leur convention nationale de coopération, initialement signée en novembre 2021. Ce partenariat vise à structurer et renforcer l’accompagnement des élus confrontés à des menaces, insultes ou agressions physiques, un phénomène jugé préoccupant depuis plusieurs années.
Un partenariat reconduit face à la hausse des atteintes
La mise en place de ce dispositif s’inscrit dans un contexte tragique et d’alerte : le décès en 2019 de Jean‑Mathieu Michel, maire de Signes (Var), renversé mortellement, et les quelque 1 300 agressions ou insultes recensées en 2020 ont conduit à formaliser une réponse dédiée aux élus. « Depuis quelques années, il y a un changement de paradigme dans les violences. La place de l’édile, que l’on considérait sanctuarisée, notamment dans les communes rurales, est désormais bousculée », a déclaré Jérôme Moreau, vice‑président de France Victimes.
Le Centre d’analyse et de lutte contre les atteintes aux élus, organisme chargé de les recenser depuis 2023, a comptabilisé 2 501 atteintes en 2024. De premières estimations pour 2025 indiquent qu’elles pourraient se situer aux alentours de 2 100 faits, mais ces chiffres restent provisoires.
Des dispositifs d’accompagnement renforcés
Pour répondre à cette montée des atteintes, l’État a accru son soutien à France Victimes. Le ministère de l’intérieur a ainsi attribué 170 000 euros en 2025, contre 160 000 euros en 2024, afin de financer des actions d’accompagnement psychologique et juridique destinées aux édiles menacés ou agressés. Il s’agit de la deuxième année consécutive d’un financement spécifique de Beauvau pour cette mission.
Ces moyens permettent le déploiement de plusieurs outils : une ligne d’écoute dédiée aux élus et à leurs proches, la plateforme Memo de vie — conçue pour sauvegarder des preuves d’agressions ou de menaces susceptibles d’être utilisées en justice — et la mobilisation de référents départementaux. Ces derniers, présents en métropole et dans les outre‑mers, offrent un accompagnement juridique et psychologique aux victimes, qu’il s’agisse d’élus eux‑mêmes ou de témoins.
Le recours à ces référents peut intervenir à la demande des autorités judiciaires : le procureur de la République de Grenoble a, par exemple, réquisitionné un référent lors de l’agression du maire (sans étiquette) de Villeneuve‑de‑Marc (Isère), Gilles Dussault, le 6 août. Selon France Victimes, le maire et plusieurs de ses proches bénéficient encore d’un suivi associatif. Une enquête est en cours pour cette affaire.
Bilan chiffré et enjeux procéduraux
Le rapport 2023‑2024 du Centre d’analyse et de lutte contre les atteintes aux élus, publié le 20 mai, signale une baisse de 9,3 % des agressions d’élus en 2024, avec 2 501 faits recensés, principalement à l’encontre de maires et de conseillers municipaux. Toutefois, cette diminution doit être replacée dans la tendance des années précédentes, marquées par des augmentations importantes : +32 % en 2022, selon le ministère, puis +19 % en 2023.
France Victimes souligne par ailleurs une évolution des comportements face au dépôt de plainte. « Nous pouvons certes observer une baisse des plaintes en 2024, mais à l’approche des élections municipales, je crains que certains élus ne déposent plus plainte », avertit Jérôme Moreau. L’association rappelle que l’accompagnement reste possible même en l’absence de dépôt de plainte, afin de répondre aux besoins psychologiques et juridiques immédiats des personnes affectées.
Ces dispositifs viennent compléter des initiatives législatives et gouvernementales. Le gouvernement avait annoncé en juillet 2023 un plan de prévention et de lutte contre les violences visant les élus, et la loi du 21 mars 2024 a renforcé la sécurité et la protection des maires et des élus locaux, en intégrant des mesures d’aide spécifiques. Le renouvellement de la convention entre l’AMF et France Victimes s’inscrit dans la continuité de ces démarches, visant à formaliser et sécuriser le soutien apporté aux élus victimes.
Si les chiffres tendent à montrer des variations d’une année sur l’autre, les acteurs associatifs et institutionnels insistent sur la nécessité d’un accompagnement constant et accessible, ainsi que sur l’importance de la collecte et de l’analyse des données pour adapter les réponses. Les montants alloués, la pérennisation des référents départementaux et les outils de preuve numériques constituent désormais des éléments centraux de cette stratégie de protection des élus.