La Commission européenne présente un « omnibus » sanitaire et alimentaire
La Commission européenne a présenté ce mardi 16 décembre un dixième « paquet omnibus » visant à simplifier la réglementation de l’Union dans des domaines variés, notamment la santé et la sécurité alimentaire. À l’image des précédents textes proposés par l’exécutif depuis un an, ce train de mesures a pour objectif affiché de renforcer la compétitivité de l’Union européenne.
Les mesures dévoilées couvrent un large éventail de sujets: la santé animale, l’étiquetage des additifs alimentaires, l’accréditation des laboratoires pharmaceutiques, ainsi que d’autres volets réglementaires liés à l’agroalimentaire. Le texte présenté par l’exécutif doit désormais obtenir l’aval du Parlement européen et du Conseil de l’UE avant d’espérer entrer en vigueur.
Une disposition sur les pesticides au centre des controverses
Parmi les dispositions du paquet, une mesure qui avait fuité fin novembre suscite de fortes réactions: elle prévoit d’accorder des autorisations potentiellement illimitées à une grande majorité de pesticides chimiques. Aujourd’hui, la réglementation européenne impose que les pesticides autorisés sur le marché fassent l’objet d’un réexamen périodique, généralement tous les dix à quinze ans.
Le changement proposé par la Commission modifierait sensiblement ce principe. Le réexamen systématique ne serait plus la norme: il deviendrait ciblé et limité à certaines substances seulement. La sélection des produits à réexaminer reviendrait aux États membres et à la Commission, sur la base de « nouvelles informations » et de « ressources disponibles ». Les critères détaillés restent, selon le texte, peu précisés.
Cette orientation a provoqué l’indignation de nombreuses ONG environnementales et de professionnels de santé. Dans une note publiée le 9 décembre, les organisations Générations Futures et PAN Europe ont alerté que, selon elles, « si cette règle avait été mise en œuvre depuis 2011, 31 substances actives de pesticides qui ont été retirées du marché du fait de leur dangerosité après une réévaluation ne l’auraient pas été… car elles n’auraient sûrement pas été réévaluées du tout ». Cette mise en garde met en lumière le risque, selon ces ONG, d’une moindre vigilance réglementaire sur des substances potentiellement dangereuses.
Pressions et soutiens: médecins, ONG et agriculture
Au début du mois, 2 300 médecins ont également apposé leur signature à une lettre ouverte adressée au gouvernement français et aux parlementaires nationaux et européens, exprimant leurs inquiétudes sur la question. Ces initiatives montrent l’ampleur du débat public et professionnel autour de la modification des règles de réévaluation.
La Commission justifie ses propositions par la nécessité de renforcer la compétitivité du secteur. Selon l’exécutif européen, les mesures de simplification présentées doivent permettre de réduire les démarches administratives et de faciliter le travail des agriculteurs et des entreprises, tout en maintenant des normes élevées de sécurité. L’exécutif estime par ailleurs que ces réformes pourraient permettre d’« économiser plus d’un milliard d’euros de coûts de mise en conformité ».
Dans une déclaration reprise par le dossier de présentation, le commissaire à l’agriculture, Christophe Hansen, détaille la philosophie du paquet: « Nous renforçons les outils disponibles pour lutter contre les maladies des végétaux en promouvant les solutions de lutte biologique. Nous soutenons nos agriculteurs en leur accordant plus de temps pour trouver des alternatives viables lorsque les substances actives ne sont plus disponibles sur le marché. Parallèlement, nous souhaitons accélérer la transition vers des alternatives plus sûres et plus durables. »
La tonalité du propos montre la double ambition affichée par la Commission: alléger les obligations administratives pour les opérateurs économiques tout en accompagnant des transitions vers des pratiques jugées plus sûres et durables.
Procédure et incertitudes
Concrètement, le texte doit maintenant suivre la procédure législative ordinaire de l’Union: examen et vote au Parlement européen, puis adoption par le Conseil. Plusieurs éléments du dossier continuent de susciter des interrogations, en particulier les modalités précises de sélection des substances soumises à réexamen et l’équilibre entre gain économique et garanties sanitaires.
Les différentes réactions — ONG, corps médical et acteurs agricoles — montrent que le débat sur cet « omnibus » devrait rester nourri tout au long des discussions entre institutions européennes et États membres. Le projet illustre la tension permanente entre simplification réglementaire et protection de la santé publique et de l’environnement.
Le dossier reste ouvert et les prochains arrêtés d’examen parlementaire et de négociation entre États membres détermineront quelles mesures seront finalement adoptées et dans quelles conditions elles entreront en vigueur.





