En quête de réassurance auprès de ses soutiens européens, Volodymyr Zelensky a effectué une visite à Paris le lundi 17 novembre, après un arrêt en Grèce la veille et avant un déplacement annoncé à Madrid. Cette rencontre, dite essentielle par les autorités ukrainiennes, intervient dans un contexte de tensions accrues sur le terrain et de difficultés politiques à Kiev.
Une situation militaire tendue
Sur le plan militaire, l’armée russe poursuit ses progrès dans l’est de l’Ukraine, alors que les forces ukrainiennes éprouvent des difficultés à contenir les avances en raison d’un « important manque de soldats », selon le cadre exposé lors de la visite. La ville de Pokrovsk, qualifiée de nœud stratégique, est citée comme étant « sur le point de tomber ». Ces éléments ont servi de toile de fond aux demandes de soutien adressées aux partenaires européens.
Parallèlement, la présidence ukrainienne est secouée par une affaire de corruption : plusieurs responsables et proches du chef de l’État sont accusés par des enquêteurs anticorruption d’avoir détourné environ 100 millions de dollars (soit environ 86 millions d’euros) de sociétés énergétiques publiques. Cette controverse fragilise la situation politique interne au moment où Zelensky multiplie les visites à l’étranger.
Messages politiques et déclarations
Face aux journalistes, M. Zelensky a souligné l’importance du soutien international : « L’Ukraine n’est pas seule dans cette guerre. La France est notre amie. La Russie a beaucoup de ressources, mais nous faisons tout pour nous défendre. La France ainsi que l’Europe libre, les États‑Unis et d’autres pays nous aident », a‑t‑il déclaré.
Le président français, Emmanuel Macron, a qualifié l’accord signé lors de la visite d’« accord historique », visant à renforcer les capacités de défense de Kiev. L’Élysée a toutefois précisé qu’il s’agissait d’une lettre d’intention — une « LOI » — et non d’un contrat ferme, et que la formalisation technique et financière restait à préciser.
Contenu de la lettre d’intention sur l’aviation
Sur le tarmac de la base aérienne de Villacoublay, M. Zelensky et M. Macron ont signé une lettre d’intention prévoyant d’importants moyens pour l’aviation de combat ukrainienne. Parmi les éléments mentionnés figurent « environ 100 avions Rafale avec leurs armements associés », des systèmes de défense sol‑air de nouvelle génération de type SAMP‑T, ainsi que des drones et de nouveaux lots de bombes AASM.
Le texte précise que ces moyens viendraient compléter des cessions déjà en cours de Mirage et inclut une référence aux six appareils promis à Kiev en juin 2024, dont « au moins trois ont été livrés depuis le début de l’année 2025 », d’après les éléments fournis lors de la visite. L’Élysée insiste sur le caractère politique de l’engagement et sur la nécessité de préciser sa mise en œuvre technique et financière.
Financement et conditions européennes
La concrétisation des livraisons dépend, selon la France, de dispositifs de financement européens. Le prêt dit SAFE (Security Action for Europe), présenté cet été par la Commission européenne, permettrait de mobiliser jusqu’à 150 milliards d’euros pour des projets d’investissement en matière de défense, y compris pour soutenir l’Ukraine.
Un autre volet évoqué renvoie aux avoirs russes gelés, toujours stockés selon les autorités chez Euroclear à Bruxelles, et à l’idée d’utiliser une partie de ces fonds pour financer la reconstruction et l’effort de défense ukrainiens. Une proposition de prêt sans intérêt d’une valeur de 140 milliards d’euros est mentionnée comme modalité possible : ce mécanisme prévoit ensuite un prêt du même montant à l’Ukraine, remboursable une fois des réparations russes versées, selon les termes exposés.
Le gouvernement français admet toutefois ses limites budgétaires : le projet de loi de finances en discussion au Parlement prévoit, pour l’instant, 120 millions d’euros d’aide à l’Ukraine, civile ou militaire. L’Élysée a qualifié l’engagement de « politique réciproque » et demandé des critères de préférence européens pour l’utilisation des fonds destinés à appuyer l’effort militaire et de défense de l’Ukraine.
Emmanuel Macron a insisté sur l’urgence et la détermination : « Nous avançons à marche forcée », a‑t‑il dit, affirmant qu’une « étape décisive » pourrait être franchie « d’ici Noël ». Le président français a par ailleurs rappelé l’exigence de réformes et de progrès en matière d’État de droit, de transparence et de lutte contre la corruption si l’Ukraine devait poursuivre son chemin vers une éventuelle adhésion à l’Union européenne.
Après Paris, M. Zelensky devait se rendre à Madrid pour rencontrer le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez et les représentants du Parlement espagnol, poursuivant ainsi une tournée européenne destinée à consolider les soutiens face à l’agression russe.





